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Newsletter 3 Master Class : une belle rencontre théâtrale

« Derrière le hublot se cache parfois du linge » au

Un spectacle qui interroge sur l’inégalité des genres dans la sphère privée

Le vendredi 29 septembre à 17h30, l’artiste Claire FRETEL franchit la porte de l’ETSL pour rencontrer 30 de nos lycéens, accompagnée d’Yselle BAZIN, chargée des relations publiques au Théâtre 13.

Comédienne de formation, Claire est aujourd’hui autrice et metteuse en scène dans la compagnie « Les filles de Simone ». Les membres du collectif se revendiquent être les filles spirituelles de Simone Veil, connue pour la loi de 1975 autorisant le droit à l’IVG, et Simone de Beauvoir, autrice du livre fondateur du féminisme moderne : « Le 2ème sexe ».

« Derrière le hublot se cache parfois du linge » est la 4ème de leurs créations très engagées dans la lutte contre l’inégalité des genres.

Dans le cadre du projet FAST, la rencontre artistique organisée en amont de la représentation à laquelle les élèves assistent est toujours une occasion privilégiée pour comprendre comment s’est construite l’œuvre artistique. Elle aide les élèves à cerner les enjeux et intentions de la pièce, leur permettant de mieux en apprécier la profondeur.

« Derrière le hublot se cache parfois du linge » est une création originale qui interroge le fonctionnement du couple hétéronormé et sa capacité à effacer ou non les inégalités de genre qui s’expriment dans la sphère publique.

Le point de départ de l’écriture de la pièce s’apparente à une thérapie de groupe : les membres échangent à bâton rompu sur le sujet, livrant tout ce qu’ils ont sur le cœur, partageant même des expériences intimes et douloureuses. Ensuite, les artistes s’informent sur le sujet en mobilisant des ressources variées. Dans la construction de la pièce « Derrière le hublot se cache parfois du linge », l’œuvre de Mona CHOLLET, « Réinventer l’amour », et l’émission animée par Victoire TUAILLON, « Les couilles sur la table », ont joué un rôle de premier plan. La 2ème phase du processus de création complète la 1ère en ce qu’elle permet de sélectionner, parmi les expériences personnelles vécues par les artistes, celles qui trouvent un véritable écho dans la société. Ce sont ces expériences que les artistes tentent de mettre en scène dans la 3ème phase du processus de création dans laquelle l’improvisation théâtrale joue un rôle clé. Des milliers de scénettes sont improvisées, une trace écrite des plus réussies est conservée, retravaillée, intégrée dans une trame qui structure et donne de la cohérence à l’ensemble. Le collectif avance en tâtonnant et le texte définitif est rarement prêt avant la veille de la première du spectacle.

Dans son récit de la construction de l’œuvre, Claire, comme d’autres avant elle depuis 2 ans, souligne l’importance de l’expérimentation et du travail en équipe dans le processus de création artistique.

À 19h45, nous entrons en salle. Le plateau est dépouillé de tous ses rideaux. Le volume est immense. Le décor est coloré. Dans un coin de la scène, 2 chaises jouxtent un porte-manteau. Au centre de la scène, un lave-linge trône devant un rideau de douche… Ces éléments de décor constituent les 2 espaces de jeu des acteurs.

Dans le 1er espace se jouent des scènes de thérapie de couple dans lesquelles chacun des deux partenaires déballe son linge sale. Le message est clair : « les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus », l’amour ne parvient pas à gommer ces différences qui s’expriment jusque dans la vie la plus intime du couple. Ces séquences dramatiques alternent avec des scènes souvent drôles qui se jouent dans l’autre espace de jeu.

On assiste d’abord à une mini-pièce de Feydeau dans laquelle un homme en pyjama végète dans son salon, une tasse de café à la main. Son épouse revient d’un évènement mondain. Il est surpris. Il s’affole. Il ne sait plus où se range la tasse à café. Il la dissimule tant bien que mal pour ne pas se faire prendre par son épouse.

Dans une 2ème scène, deux personnages passent leur tête à travers le hublot du lave-linge : la femme est  journaliste,

l’homme est un expert de la masculinité. Elle est hargneuse. Il minimise. Les rires ont fusé dans la salle à l’évocation des 4 stratégies mises en œuvre par les hommes pour éviter d’être sollicité par leur épouse dans la réalisation des tâches domestiques. Citons la stratégie de l’escargot qui parle d’elle-même. Nul besoin de développer.

Dans une 3ème scène, nous assistons à une traduction mathématique de la relation homme-femme : dans le système D’ (= « déprime »), α (= homme) et β (= femme) interagissent entre eux par une relation réciproque de type domination (d’α sur β) – soumission (de β sur α) : hilarant !

Dans une 4ème scène inspirée de la célèbre comédie musicale « Grease », une jeune étudiante insouciante et légère tombe amoureuse. Lorsqu’elle croise le regard de son futur partenaire, le blouson à l’effigie de son université glisse lentement de ses épaules et s’affaisse au sol. Elle ne se retourne pas pour le ramasser. Tout est dit : elle abandonne ses études pour consacrer le reste de sa vie à son époux. Elle se réalisera dans sa vie conjugale… ou pas.

Dans une 5ème scène, un homme est effondré dans les bras de sa compagne en position de fœtus. Elle le connecte à un tuyau et souffle à l’autre bout. L’homme se redresse progressivement, puis se met à voler tel Icare. Vidée de son souffle, elle s’effondre dans l’indifférence. Lui, en lévitation dans l’espace, n’y prête nulle attention. La symbolique est forte : la femme est le pilier de l’homme, elle lui insuffle la force vitale qui lui donne l’énergie d’entreprendre mais n’en retire aucune reconnaissance.

Une 6ème scène reproduit des jeux d’enfants dans la cour de récréation : il est un super-héros, elle est une princesse en danger… Cette scène rappelle que nous sommes bercés, dès notre plus tendre enfance, par des récits du genre difficiles à déconstruire.

L’avant-dernière scène tranche cruellement avec toutes les autres. Les acteurs rejouent une scène célèbre d’« Othello » de Shakespeare pour dénoncer la violence conjugale et le féminicide. Othello, victime d’un complot, assassine sauvagement sa femme Desdemona, persuadé de son adultère avec l’un de ses hommes, Cassio. À ce moment de la pièce, la question de l’inégalité des genres est portée à son paroxysme.

Elle s’achève avec une petite touche d’optimisme dans laquelle un homme accepte volontiers d’être guidé par son épouse pour comprendre comment mieux la satisfaire au lit… par une mise en scène parfaitement adaptée au jeune public !

Pour exercer nos élèves à exprimer une émotion esthétique, un jugement critique, nous les avons invités à nous faire un retour de leur expérience au Théâtre 13. Onze d’entre eux ont répondu. Nous les remercions chaleureusement et partageons avec vous quelques-uns de leurs témoignages :

« La pièce de théâtre était très intéressante et très drôle, son décor attrayant. Et même si nous n’avons pas encore l’expérience de la vie de couple, certaines situations et certains personnages nous parlent : on a parfois l’impression de voir nos parents. »

Pauline, terminale STL Sciences physiques et chimiques du laboratoire

« J’ai trouvé la pièce de théâtre intéressante. Elle traite d’un sujet complexe qui concerne tout le monde. Elle peut être inspirante pour le public, l’occasion pour lui de s’observer et de prendre du recul. »

Malo, terminale STL Biochimie Biologie Biotechnologies

« Pièce amusante, bien rythmée, rapide lors des moments drôles, plus lente lors des moments graves. Très bon jeu des acteurs et excellente mise en scène avec une belle interaction des acteurs avec le décor. Mention spéciale pour la scène de l’émission de radio et celle de la conférence mathématisant le rapport homme-femme. »

Nicolas, terminale STL Sciences physiques et chimiques du laboratoire

« J’ai trouvé la pièce géniale, drôle, amusante, et le concept très original ! Les acteurs étaient très bons dans leur rôle et étaient captivants. L’histoire était bien écrite et le mélange de fiction et d’histoires vraies vécues par certains membres du collectif « les filles de Simone » était très intéressant. Une pièce efficace pour dénoncer les inégalités et qui encourage les hommes à faire des efforts. »

Tristan, terminale STL Sciences physiques et chimiques du laboratoire